Les entrepreneurs, entre soif de liberté et défis quotidiens

Comme le montrent les résultats de l’étude réalisée par L-Expert-Comptable et l’organisme de données statistiques FLASHS auprès de 1 200 dirigeants d’entreprises et indépendants, c’est avant tout par goût de la liberté, besoin d’indépendance et assouvissement de leur passion que les entrepreneurs se lancent dans l’aventure.

S’ils se déclarent très majoritairement satisfaits de leur situation, ils n’en occultent pas pour autant les difficultés organisationnelles et financières auxquelles ils sont nombreux à devoir faire face. Avec des conséquences non négligeables sur leur vie sentimentale et leur santé.

Une satisfaction générale

Comment les dirigeants d’entreprises et les indépendants perçoivent-ils globalement leur situation professionnelle actuelle ? À cette question, une écrasante majorité indique en être satisfaite. C’est en effet le cas de 93% des personnes interrogées dans cette étude, dont 41% indiquent qu’ils en sont très satisfaits. Pour autant, et comme nous allons le voir, ce sentiment très positif ne doit pas masquer les obstacles qui se dressent sur le parcours des entrepreneurs.

Les raisons qui poussent les Françaises et les Français à se lancer dans l’aventure entrepreneuriale sont multiples, mais trois d’entre elles ressortent plus particulièrement : la liberté de gérer leur temps, citée par 46 % des répondants, l’indépendance financière (43 %), et la passion pour le projet ou le domaine d’activité (40 %). À un niveau très proche, la perspective de ne pas avoir de supérieur hiérarchique a été un moteur pour 35% des dirigeants et indépendants consultés. Le besoin de liberté et d’indépendance dans tous les aspects de la vie professionnelle, illustrée par l’expression courante « être son propre patron » ressort donc clairement.

Il est par ailleurs intéressant de noter que moins d’un quart (23%) des entrepreneurs ont été prioritairement poussés par le désir d’innover, et encore moins par des opportunités de marché (19%), l’impact social et environnemental auxquels ils pourraient contribuer (18%) ou encore la volonté de transmettre un héritage familial (16%). C’est donc en premier lieu la satisfaction d’une envie personnelle et l’épanouissement individuel que l’on espère en tirer qui agissent comme les principaux leviers à se lancer dans l’aventure.

Un équilibre de vie à trouver

Interrogés sur les facteurs qui permettent selon eux d’assurer un bon équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, les entrepreneurs citent sans surprise la nécessité de gérer correctement son temps. Plus de la moitié (54%) considèrent en effet qu’être bien organisé en la matière est une condition sine qua non pour maintenir cette harmonie, harmonie qui passe pour 39% des personnes interrogées par le fait de savoir fixer des limites claires entre les deux sphères.

Être passionné par l’activité que l’on exerce apparaît également comme un facteur important d’équilibre pour près d’un entrepreneur sur deux (46%), tout comme la possibilité de prendre du temps pour soi (40%) ou encore de pouvoir compter sur la bienveillance de son entourage proche (37%).

En revanche, la faculté de déléguer, et donc être en capacité de se délester d’un certain nombre de tâches, n’est évoquée que par un cinquième (20%) des répondants. Un chiffre qui illustre certainement pour nombre d’entre eux une tendance à vouloir tout contrôler et gérer par eux-mêmes.

Points de vigilance

S’ils identifient bien les facteurs qui contribuent en théorie à conserver un juste milieu entre vie pro et vie perso, les dirigeants et indépendants désignent clairement les trois éléments qui, au contraire, mettent en péril cet équilibre. La difficulté à se déconnecter du travail (51%), la pression financière subie (49%) et la charge de travail trop importante (48%) occupent le podium des difficultés susceptibles de le compromettre.

Dans une mesure moindre, mais non négligeable, avoir du mal à déléguer et ne pas bénéficier du soutien de sa famille ou de ses amis sont respectivement pointés par 33% et 24% des répondants.

Sentiments sous pression

On le voit, les entrepreneurs sont confrontés à des situations qu’ils ont parfois du mal à gérer et auxquelles ils doivent consacrer temps et énergie. Un investissement qui, dans bien des cas, n’est pas sans répercussions sur leur vie sentimentale. Pour preuve, quelque 27% des personnes interrogées affirment que leur activité professionnelle a déjà eu des conséquences sur leur vie de couple jusqu’à entraîner une séparation ou un divorce. Un chiffre imposant auquel il convient d’ajouter les 17% qui indiquent que si elle n’a pas eu lieu, une telle rupture a bien failli se produire.

Les problèmes financiers, une réalité commune

Nerf de la guerre, l’argent est une préoccupation récurrente chez les entrepreneurs. Près des trois quarts d’entre eux (72%) indiquent ainsi avoir déjà rencontré des soucis financiers significatifs, dont 21% disent que cela leur arrive fréquemment. En l’espèce, les femmes (74%) sont plus nombreuses que les hommes (69%) à témoigner de tels problèmes. Ces difficultés semblent principalement liées à des causes externes à la conduite de l’entreprise, à l’exemple des crises économiques (31 %), des retards de paiement des clients (28 %), ou encore du manque de liquidités à un moment ou à un autre de l’activité (20%). Toutefois, 12% des répondants reconnaissent qu’elles ont été le fruit d’une gestion financière défaillante et 9% de choix stratégiques hasardeux.

Face à ces obstacles, les entrepreneurs utilisent des recettes simples dans leur principe, même si elles peuvent s’avérer délicates dans leur application : 50% ont réduit la voilure en revoyant leurs dépenses à la lumière de la situation et 43% se sont engagés dans la recherche de nouvelles rentrées d’argent. Afin de répondre aux difficultés rencontrées, 35% ont décidé par ailleurs de changer la stratégie en vigueur dans leur entreprise. Certains dirigeants ont pour leur part fait appel à des compétences extérieures, qu’il s’agisse de partager leur expérience avec leurs pairs (19%) ou de solliciter les conseils de professionnels (16%).

Le capital santé en danger

Si, comme on l’a constaté plus haut, les contraintes de la vie d’entrepreneur ne sont pas sans conséquences sur la relation de couple, les difficultés financières impactent pour leur part fortement la santé de celles et ceux qui les subissent. En effet, plus de 8 sur 10 (82%) font état de répercussions plus ou moins fortes sur leur bien-être physique et/ou psychologique. Parmi eux, 20% déclarent que les soucis d’argent dans leur activité professionnelle ont nécessité un suivi médical pour des problèmes graves tels que l’anxiété généralisée, la dépression ou des douleurs invalidantes. Celles et ceux ayant déjà fermé une entreprise, très fréquemment pour des raisons de fragilité financière, sont plus concernés encore : 30% d’entre eux font état de tels troubles contre 17% chez celles et ceux n’ayant pas eu à prendre une décision de ce type.

Difficultés financières : en parler ou pas

Si elles restent un sujet souvent délicat à aborder dans la société française, les questions d’argent ne semblent pas être un tabou pour les responsables d’entreprises et les indépendants. 83% des entrepreneurs qui ont été confrontés à des problèmes pécuniaires s’en sont en effet ouverts à des membres de leur famille ou à leurs proches, la moitié (50%) indiquant n’avoir pas eu de difficulté à le faire. En revanche, et même si elles en ont parlé, la démarche s’est avérée difficile pour 33% des personnes concernées, plus encore pour les hommes (39%) que pour les femmes (27%). Enfin, 17% des répondants déclarent qu’ils n’ont pas osé faire part de leurs problèmes à leur entourage.

1. INSEE, « Les créations d’entreprises en 2023 »

2. Etude OpinionWay pour CCI France et le MEDEF, « Les Français et l’entrepreneuriat » (février 2024)

Enquête réalisée par FLASHS pour L-Expert-Comptable.com du 7 juin au 14 juin 2024 par questionnaire autoadministré en ligne auprès d’un panel Selvitys de 1 200 dirigeants d’entreprises et freelances âgés de 18 ans et plus, représentatif de ces catégories socio-professionnelles.