Un salarié en télétravail peut-il bénéficier d’une indemnité d’occupation

Les événements ont eu lieu en 2018. Un représentant commercial porte l’affaire devant le tribunal des prud’hommes. Il désapprouve son employeur et réclame le règlement de diverses sommes. Il demande une compensation pour l’occupation de son logement parmi ces montants, car lorsqu’il n’est pas en déplacement, il exerce son travail depuis son domicile. Selon le salarié, il a droit à cette compensation, parce que son employeur ne lui a pas fourni de bureau au sein de l’entreprise. En général, dans ce genre de situation, le droit jurisprudentiel répond favorablement à la requête du salarié. Ce qui suscite la controverse, c’est que le vendeur réclame cette compensation pour les cinq dernières années, une revendication que conteste son employeur.
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En mars dernier, la Cour de cassation a tranché le différend et a statué que l’indemnité doit être versée pour les deux dernières années. Cependant, cette fois-ci, elle « jette un pavé dans la mare », déclare l’avocate Corinne Baron-Charbonnier, en dépassant largement le cadre de la question initiale.
Dans une décision consignée au bulletin, ce qui lui donne une certaine signification, la Cour indique que l’intrusion dans le lieu de résidence d’un employé pour des raisons professionnelles représente une « immixtion dans sa vie privée ». Elle souligne que l’employé peut demander une compensation s’il ne dispose pas d’un bureau au sein de l’entreprise. Elle ajoute aussi, et c’est la grande nouveauté, que lorsque « le télétravail est convenu entre l’employeur et l’employé.» Lorsque tous approuvent, même si l’employé a un bureau dans la société. « C’est la première fois que la Cour de cassation se prononce sur ce sujet, alors que les discussions demeurent intenses concernant la couverture des coûts du télétravail », souligne l’avocate.
L’idée d’assumer une portion du loyer, des coûts de chauffage et d’électricité pour leurs employés en télétravail ne fait pas spécialement plaisir aux entreprises. Surtout que la Cour de cassation ne donne pas d’indications sur la méthode de calcul de cette indemnité.
Pour l’instant, les avocats représentant les employeurs observent comment cette nouvelle jurisprudence sera interprétée devant les prud’hommes et les cours d’appel lors de futurs litiges. « Sur le plan philosophique, l’indemnisation pour l’occupation du domicile a pour objectif de réparer un dommage », déclare Corinne Baron-Charbonnier. Un employé peut-il réellement invoquer une contrainte s’il sollicite le télétravail pour des raisons personnelles ? Les discussions dans les salles d’audience promettent d’être vives.